Aller au contenu principal

Actualités vétérinaires et scientifiques

Vétérinaire et éleveur : quel contrat moral ?

Quels sont les contours du contrat moral qui lie l’éleveur et le vétérinaire ?

Quel est le rôle du vétérinaire dans la bientraitance et le bien-être en élevage d’animaux de rente ?

L’avis du comité d’éthique animal, environnement, santé, en accord avec la saisine du Conseil National

de l’Ordre des Vétérinaires ne traite que des animaux de rente, et du contrat entre un vétérinaire et

un éleveur professionnel.

Le vétérinaire considéré dans l’avis est le vétérinaire praticien en exercice, qu’il soit libéral ou salarié.................

Telécharger le document ICI

Les autres métiers de vétérinaire (industrie, fonction publique, …) ne sont pas pris en compte dans l’avis. De même, les missions régaliennes exercées par le vétérinaire praticien en tant que collaborateur occasionnel de l’État (mandat sanitaire par exemple) ne relèvent pas directement d’un contrat entre l’éleveur et le vétérinaire et ne seront donc pas abordées dans cet avis. Un contrat peut être défini comme un accord de volontés ayant pour but d ’engendrer des obligations réciproques. Un contrat peut avoir différentes dimensions, juridique, sociale et sociétale, et morale. Si la dimension juridique d’un contrat est fréquemment régie de manière explicite, les autres dimensions sont bien souvent plus implicites, reposant sur une dynamique humaine et relationnelle. Éleveurs et vétérinaires partagent une histoire commune et des objectifs communs de soins aux animaux. Ces soins, préventifs ou curatifs, permettent de protéger les animaux de rente des maladies et des affections et de les maintenir dans de bonnes conditions de production. Ils sont réalisés dans le respect du bien-être des animaux et contribuent à améliorer celui-ci. Ils prennent en compte les aspects zootechniques et technico-économiques de l’élevage. Cependant, si l’élevage des animaux de rente a pour but premier de satisfaire aux besoins alimentaires de la population humaine à des prix accessibles à tous, l’éleveur partage avec le vétérinaire la nécessité de prendre également en considération le respect de la santé publique, dans une approche « une seule santé » (One health). Éleveurs et vétérinaires doivent de surcroît, de plus en plus, intégrer dans leurs pratiques, les impératifs liés aux attentes de la société qui se font sentir avec de plus en plus de vigueur : lutte contre le changement climatique, respect du bien-être animal, maintien de la biodiversité… Ils participent ainsi à la nécessaire transition des systèmes d’élevage en s’appuyant sur les données de la science et en prenant en compte les évolutions réglementaires. Le contrat qui lie éleveurs et vétérinaires dépasse alors la seule dimension juridique et s’inscrit également dans les dimensions sociale, sociétale, morale et éthique. • La dimension juridique est liée aux obligations des cocontractants, du fait de la prestation attendue du vétérinaire et du paiement de celle-ci par l’éleveur, dans les conditions prévues par le droit et par la déontologie vétérinaire. Les obligations sont réciproques dans ce contrat. Le non-respect de la dimension juridique peut avoir des conséquences pécuniaires. • Les dimensions sociale et sociétale sont, quant à elles, liées aux rôles confiés aux vétérinaires et aux éleveurs par les organisations professionnelles, par les autorités et par la société, pour : 2 o En premier lieu fournir une alimentation de qualité et en quantité suffisante et participer au maintien de la santé publique, o Mais aussi, en lien avec les nouvelles connaissances scientifiques, s’engager dans les transitions essentielles des modes d’élevage, qu’il s’agisse des transitions agroécologiques, climatiques ou liées à la biodiversité, au bien-être des animaux et à leur bientraitance. • La dimension morale ou éthique du contrat, repose sur des attentes et des intentions en termes d’engagement mutuel qui ne sont généralement pasidentifiées avec clarté et précision et qui vont au-delà des obligationsjuridiques,sociales etsociétalesréciproques, englobant des préoccupations éthiques. C’est au titre de ses dimensionssociale,sociétale, morale et éthique que le contrat vétérinaire - éleveur évolue au-delà du contrat de soins. Le vétérinaire est amené à accentuer son rôle de sensibilisation et d’information auprès de l’éleveur pour accompagner ce dernier dans les transitions, en prenant en compte ses contraintes. Selon son Code de déontologie, le vétérinaire « prend en compte les conséquences de son activité professionnelle sur l'environnement » 1 et « respecte les animaux » 2 . Le vétérinaire peut aussi, et doit, dans certains cas, notamment pour les sujets sur lesquels il a les compétences requises comme le bien-être des animaux ou certains enjeux environnementaux, aller jusqu’au conseil pour participer à l’amélioration continue de l’élevage. Par exemple, la prudence dans l’usage des antiparasitaires pour limiter les effets négatifs sur l’environnement, comme cela a été le cas pour l’usage raisonné des antibiotiques, doit, a minima, être discutée entre éleveur et vétérinaire. De même, le vétérinaire peut informer, voire conseiller l’éleveur, sur l’alimentation des animaux pour limiter l’impact environnemental négatif de cette alimentation et pour minimiser, dans la mesure du possible, la compétition entre alimentation animale et alimentation humaine. Un contrat moral s’appuie sur des notions d’équité et d’autonomie, dont la réciprocité est le socle. Le contrat moral entre vétérinaire et éleveur doit également respecter le principe d’indépendance professionnelle du vétérinaire, qui est une valeur cardinale et inaliénable partagée par toutes les professions libérales. Cette indépendance du vétérinaire s’entend, selon la définition établie par l’Ordre national des vétérinaires, comme « son obligation de se référer uniquement à ses connaissances scientifiques et à son expérience avec, comme objectifs indissociables, les intérêts de l’animal et de la santé publique ainsi que les intérêts des clients, sans que quiconque, à l’exception de raisonsimpérieuses d’intérêt général, ne commande aux vétérinairesleurs actes professionnels » 3 . Elle s’applique à tous les vétérinaires en exercice, qu’ils soient indépendants, associés, collaborateurs libéraux ou salariés. Enfin, un contrat nécessite, par définition, la présence de deux cocontractants. Le contrat vétérinaire – éleveur ne fait pas exception. La problématique du maillage vétérinaire et du maintien d’un nombre suffisant d’exploitations agricoles est absolument majeure, notamment si la France veut garder son potentiel agricole dans les années futures. Il s’agit d’un enjeu et de choix politiques et sociétaux qui dépassent la seule responsabilité du couple éleveur-vétérinaire. Les questions du renouvellement des générations agricoles et vétérinaires, de leur répartition dans les territoires, de la rémunération et des 1 Article R242-33.IX du Code de déontologie vétérinaire 2 Article R242-33.VIII du Code de déontologie vétérinaire 3 www.veterinaire.fr/system/files/files/2022-03/ODV-INDEPENDANCE-VETERINAIRE-INTERACTIF.pdf 3 conditions de travail sont déjà abordées conjointement par la profession vétérinaire et la profession agricole mais aussi les pouvoirs publics et les autres acteurs pour trouver les réponses les plus adéquates4 . La mise en œuvre des solutions sera structurante pour garantir une présence suffisante sur l’ensemble du territoire, nécessaire à l’existence d ’un contrat moral entre vétérinaire et éleveur. Le contrat de soins Initialement affirmée dans l’arrêt Mercier, rendu par la Cour de cassation le 20 mai 1936, la nature contractuelle de la relation qui se noue, en médecine humaine, entre un soignant et son patient a servi de modèle pour le contrat de soins vétérinaires, entre le vétérinaire et le détenteur de l’animal, afin de prendre en charge la santé de l’animal. Ce contrat de soins peut se décliner en deux activités complémentaires : le diagnostic et le traitement des animaux malades, et les recommandations ou les actions du vétérinaire visant à prévenir l’apparition des maladies et, pour les animaux de rente, à les maintenir en capacité de production dans le respect des exigences de sécurité sanitaire. Ce contrat bipartite impose des obligations au vétérinaire. Ainsi, le vétérinaire a une obligation de moyens, mais non de résultat, dans les soins prodigués aux animaux. Cette obligation engage sa responsabilité civile et peut être sanctionnée juridiquement si elle n ’est pas satisfaite. Il a également l’obligation d’informer son co-contractant sur le diagnostic posé et sur les caractéristiques du traitement prodigué ou proposé. Dans le cadre de ce contrat, le vétérinaire a, de plus, une obligation de permanence et de continuité de soins. La continuité lui impose d’assurer, ou de faire assurer, le suivi médical, urgent ou non, des animaux sur lesquels il est intervenu médicalement ou chirurgicalement. Lorsqu'il se trouve en présence ou est informé d'un animal malade ou blessé qui est en péril, la permanence lui impose de prendre en charge et de proposer les actesjustifiés par l’urgence en accord avec le détenteur de l’animal, dans les limites de ses compétences, de sa technicité, de son équipement et de son assurance en responsabilité civile professionnelle. Cette permanence peut être organisée à travers un service de garde.4F 5 Cette obligation de permanence et de continuité des soins s’impose au vétérinaire traitant mais également à la profession. Cependant, compte tenu des tensions actuelles sur la démographie vétérinaire mais également de la nécessité de mieux prendre en compte l’équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle des vétérinaires, elle est devenue particulièrement difficile à honorer dans certaines régions, voire irréalisable dans certains territoires. Ainsi, un éleveur doit pouvoir compter sur un vétérinaire pour soigner ses animaux. Si le vétérinaire habituel n’est pas disponible, il doit trouver les solutions nécessaires à la continuité des soins. Le vétérinaire engagé dans un contrat de soins avec un éleveur doit prendre soin des animaux, même s’il est en désaccord avec les conditions d’élevage des animaux. En cas d’indisponibilité, il doit proposer une solution alternative à l’éleveur, et cela sous réserve du droit de refus qui peut s’appliquer en cas d’incivilités constatées (insultes, menaces, risques d’agression)5F 6 . 4 www.veterinaire.fr/system/files/files/2023-03/Rapport%20v02032023.pdf 5 Articles R242-48 IV, V et R. 242-61 du CDD 6 Avis du CNOV de mars 2023 sur le droit de retrait 4 Le contrat de soins impose également des devoirs à l’éleveur. Ce dernier a l ’obligation contractuelle : • D’apporter au vétérinaire, pour l’établissement du diagnostic, toutes les informations nécessaires dont il a connaissance ; • De suivre les demandes du vétérinaire durant l’acte de soins pendant lequel la garde de l’animal est transférée (car les conséquences éventuelles d’une mauvaise contention de l’animal sont de la responsabilité juridique du vétérinaire) ; • Enfin de le rémunérer pour ses actes et pour la délivrance des médicaments. Les nouvelles exigences demandées aux vétérinaires devraient faire l’objet du renforcement de la rémunération liée à la délivrance de conseils. Les activités de soins, pour s’appliquer dans de bonnes conditions, ne se limitent pas aux seules obligations contractuelles. Ainsi l’éleveur doit-il faire appel au vétérinaire aussisouvent que nécessaire et sans attendre une dégradation de la situation. Enfin, il doit respecter l’observance, c ’est-à-dire la mise en œuvre des traitements prescrits. De son côté, le vétérinaire prend en compte les contraintes, financières, matérielles et logistiques de l’éleveur, ainsi que les évolutions réglementaires et les éventuelles répercussions sur l’environnement lors de la mise en place des traitements. Le contrat de soins s’inscrit alors dans un temps long car éleveur et vétérinaire sont tous les deux engagés dans le maintien de la pérennité de l’élevage. Ce temps long participe à une bonne connaissance mutuelle des deux partenaires et des problématiques de l’élevage et tend à renforcer la dimension morale du contrat entre les deux professionnels. Enfin, le contrat de soins s’applique dans un cadre plus large de missions de type « service public », missions acceptées comme telles par les vétérinaires et les éleveurs, dans la mesure où ils œuvrent ensemble pour fournir une alimentation de qualité et en quantité suffisante et pour maintenir la santé publique. Ils sont, dans ce cadre, non seulement engagés l’un envers l’autre, mais aussi envers la société. La mission d’information et de conseil L’obligation d'information découlant du contrat de soins ne résume pas l ’ensemble des missions d’information et de conseil de l’éleveur par le vétérinaire. En effet, dans le cadre d’un contrat moral, le vétérinaire participe à la sensibilisation, l’information et, dans certains cas, au conseil, de l’éleveur sur l’évolution de la réglementation, sur le respect du bien-être des animaux, sur l’impact environnemental de l’élevage, et sur les progrès scientifiques dans ces domaines. En matière de bien-être des animaux dans les élevages, trois concepts complémentaires sont à distinguer : la bienveillance, la bientraitance et le bien-être lui-même. Le bien-être, tel que défini parl’Anses en 20187 , est un état mental et physique positif, propre à chaque animal qui dépend de sa perception, mais aussi de son expérience ou encore de son tempérament. Son évaluation nécessite l ’observation de l’animal et on se trouve dans une obligation de résultat. 7 « Le bien-être animal est l’état mental et physique positif (d’un animal), liés à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal ». Anses, février 2018, www.anses.fr/fr/system/files/SABA2016SA0288.pdf 5 La bientraitance correspond à l’action de l’humain visant à assurer le bien-être chez l’animal en prenant en compte ses besoins8 . Elle contribue très largement au bien-être de l’animal mais ne peut pas le garantir. Elle correspond à une obligation de moyens de l’humain envers l’animal. Le bien-être et la bientraitance peuvent, dans certains cas, contribuer à la productivité de l’élevage. Ils améliorent les conditions de vie, de travail et d’estime de soi de l’éleveur et de toutes les personnes en contact avec les animaux. La bienveillance correspond à une empathie envers les animaux avec la volonté de bien les traiter9 . Pour autant qu ’elles sont nécessaires au bien-être des animaux, la bienveillance et la bientraitance ne sont pas toujours suffisantes. Le bien-être étant en effet propre à chaque animal et influencé par sa perception, il peut ne pas être optimal malgré les bonnes actions de l’humain qui s’en occupe. De même que la bienveillance ne se traduit pas nécessairement en bientraitance. Un propriétaire ou détenteur bien intentionné peut, par méconnaissance des besoins et des comportements des animaux, ne pas agir convenablement à leur égard. Par sa mission de conseil auprès des éleveurs et son apport sur les connaissances scientifiques, le vétérinaire doit permettre de transformer la bienveillance en bientraitance. Par sa connaissance du comportement et de la physiologie de l’animal, il peut et doit participer à l’évaluation du bien-être des animaux dans les élevages. Ceci pour accompagner l’éleveur vers une amélioration du bien-être de ses animaux. La mission du vétérinaire en faveur du bien-être animal est donc pluslarge que le seul contrat de soins. En cas de dégradation du bien-être des animaux ou de non-respect de la réglementation, le vétérinaire a le devoir d’alerter l’éleveur et de l’accompagner pour essayer de trouver une solution. Si la situation persiste, il contacte la DDPP (direction départementale en charge de la protection des populations) qui pourra faire appel à la cellule départementale opérationnelle de lutte contre la maltraitance. L’élevage, par l’intermédiaire des services environnementaux et écosystémiques, apporte de nombreux bienfaits à l’environnement et à l’humanité. Certaines pratiques contribuent au maintien de la biodiversité en participant à la mosaïque des habitats, notamment par l’intermédiaire des haies et des prairies. L’élevage participe à la fertilisation naturelle des sols et les prairies stockent une partie du carbone émis par les animaux. Cependant, l’élevage émet des gaz à effet de serre. Et certaines pratiques ont un impact négatif sur l ’environnement, qu’il s’agisse des pressions exercées sur la biodiversité, avec notamment le changement d’usage des terres et la destruction des habitats, de la pollution et de l’exploitation des ressources naturelles. Les éleveurs, en se fondant sur les nouvelles connaissances (notamment en éthologie) et en prenant en compte les progrès techniques, font régulièrement évoluer leurs pratiques et leurs installations pour limiter ces impacts négatifs. Des démarches de progrès sont cependant encore nécessaires pour 8 « La bientraitance est la volonté visant à satisfaire les besoins physiologiques et comportementaux propres à chaque espèce et à chacun de leurs milieux de vie dans le but d’atteindre chez l’animal, au-delà de l’état d’adaptation, un état imaginé comme comparable à l’état de bien-être chez l’homme ». academie-veterinaire-defrance.org/fileadmin/user_upload/Publication/PrisesPosition/AVF_2007_Bientraitance_Rapport.pdf 9 La bienveillance sont Les intentions et discours visant à signifier une sympathie, voire une empathie, vis-à-vis des animaux, un respect, une volonté de prise en compte de leurs besoins, ou de leurs intérêts, et ce sans préjuger des effets que peuvent avoir ces discours, ces intentions sur les animaux. chaire-bea.vetagrosup.fr/video-que-peut-apporter-la-sociologie-a-la-problematique-du-bien-etre-animal-focus-sur-le-concept-debienveillance/ 6 aller encore plus loin et également pour éviter de voir s’accroître les incompréhensions qui peuvent exister entre le citoyen et le monde de l’élevage. Ces incompréhensions peuvent à terme mettre en péril l’élevage en France et de manière indirecte l’activité vétérinaire rurale. Éleveurs et vétérinaires sont alors étroitement liés, au-delà du seul contrat de soins. En conséquence, les vétérinaires peuvent et, dans certains cas, doivent jouer un rôle de premier ordre dans ces améliorations, que ce soit par l’intermédiaire d’une sensibilisation des éleveurs, de l’information qu’ils peuvent apporter ou des conseils, en accord avec leurs compétences ou en orientant vers un autre professionnel, qu’ils peuvent prodiguer. En effet, le vétérinaire, par sa connaissance scientifique et sa vision globale sur l’élevage, et les contraintes de l’éleveur, peut apporter son concours pour envisager des solutions pragmatiques. De plus, par son indépendance, le vétérinaire bénéficie d’une image d’intégrité qui peut aider à accroître la confiance entre éleveurs et citoyens et faire converger les attentes et les contraintes des éleveurs et des citoyens. Enfin, les crises sanitaires des dix dernières années ont montré le besoin de solutions en faveur d’une meilleure articulation entre santé animale, santé humaine et santé des écosystèmes. Les vétérinaires sont des partenaires incontournables des éleveurs dans la prévention et la mise en œuvre de mesures de biosécurité dansle cadre d’une approche « une seule santé » (One Health), où santé humaine,santé animale et préservation de l’environnement sont étroitement liées. Plus récemment, une approche « un seul bien-être » (One Welfare) s ’est développée. Cette approche où bien-être des animaux et bien-être de l’éleveur sont interconnectés doit être abordée conjointement par les vétérinaires et les éleveurs. Ces évolutions s’inscrivent pleinement dans l’évolution du contrat moral entre éleveurs et vétérinaires. Éleveurs et vétérinaires sont donc des partenaires privilégiés, fortement liés les uns aux autres. Leur relation s’exprime au-delà du seul contrat juridique lié aux soins des animaux en participant conjointement à des missions, confiées par l’État ou plus largement par la société, relatives au respect du bien-être des animaux, de la santé publique, des enjeux environnementaux dont la lutte contre le réchauffement climatique et l’érosion de la biodiversité. Recommandations Recommandations à destination des vétérinaires praticiens - Afin d’être en mesure de participer à la sensibilisation, à l’information, voire aux conseils auprès des éleveurs sur les évolutions à mener, les vétérinaires praticiens doivent renforcer leurs compétences relatives aux enjeux liés au bien-être des animaux et aux impacts environnementaux, via la formation continue mais aussi via une veille sur les innovations technologiques et les évolutions de pratiques. - Le vétérinaire doit favoriser une approche « One Health » autant que possible, la santé humaine, la santé animale et la santé des écosystèmes étant étroitement liées. Il développe également une approche « One Welfare », le bien-être des animaux et le bien-être de l’humain ne pouvant pas être respectés l’un sans l’autre. - Au-delà du contrat de soins, le vétérinaire doit alerter et accompagner l’éleveur, mais également les pouvoirs publics comme le prévoit la réglementation le cas échéant, lorsqu’il 7 constate des situations dégradées de bien-être animal, des impacts négatifs sur l’environnement ou sur la biosécurité. Recommandations à destination de la profession vétérinaire et de la profession agricole - La profession vétérinaire et la profession agricole doivent continuer à collaborer pour mettre en œuvre des solutions, notamment à une échelle territoriale, permettant d’assurer, autant que possible, un maillage vétérinaire et une densité d’élevages suffisants pour que chaque éleveur puisse avoir un vétérinaire et chaque vétérinaire suffisamment de clients. - La profession vétérinaire doit accroître l’offre des modules de formation continue et faire évoluer la formation initiale pour mieux intégrer les nouveaux enjeux liés au bien-être des animaux et aux impacts environnementaux dans l’exercice professionnel des vétérinaires. Des groupes de réflexion sur ces thématiques doivent être créés ou renforcés. - La profession vétérinaire et la profession agricole doivent poursuivre leurs réflexions pour renforcer la part de la rémunération liée au conseil dansle revenu des vétérinaires et diminuer la part liée à la délivrance des médicaments. Ce meilleur équilibre entre délivrance du médicament, activités de soins et conseils est un objectif qui va nécessiter une forte mobilisation des vétérinaires, mais aussi des éleveurs et des pouvoirs publics et qui pourrait se faire pour partie par de la contractualisation entre les différents acteurs. - La profession vétérinaire doit accentuer son rôle de conseil auprès des pouvoirs publics pour participer aux débats sur les évolutions des systèmes d’élevage. Recommandations aux pouvoirs publics et à la société - La prise en compte des enjeux sociétaux et la transition des systèmes d’élevage à venir sont tellementimportantes qu’elles ne pourront pasreposersurle seul couple vétérinaire - éleveur. Un soutien des pouvoirs publics, des collectivitésterritoriales, desindustriels, des distributeurs et des consommateurs est nécessaire. - Les pouvoirs publics doivent travailler à inclure les exigences liées aux enjeux sociétaux dans la négociation des normes et contrats internationaux, et notamment dans les accords de libreéchange, ainsi que veiller à la mise en place de clauses de réciprocité pour les produits importés afin de ne pas créer de distorsion de concurrence pour les éleveurs français et européens, ni de disparité en matière de santé publique et de protection animale. - La société et les pouvoirs publics doivent reconnaître la dimension centrale et le positionnement des vétérinaires dans le concept d’une seule santé à hauteur des exigences qui leursont imposées pour le respect de la santé publique et la prise en compte des nouveaux enjeux environnementaux et les nouvelles attentes de la société. Cela passe notamment par la conception de formations conjointes aux vétérinaires, aux médecins et aux écologues et une plus grande participation aux instances consultatives sur ces sujets.