ACADÉMIE VÉTÉRINAIRE DE FRANCE
Reconnue d'utilité publique par décret du 16 avril 1878
« JOURNÉE DU PRÉSIDENT»
Jeudi 4 Novembre 2021
Salle des Séances de l’Académie Nationale de Médecine
16 rue Bonaparte 75006 Paris
Présentiel sur inscription obligatoire academie(at)veterinaire.fr et visioconférence
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Président : Jean-Pierre JÉGOU
Coordinateurs : Christian DUMON, Bertrand RIDREMONT et J-P JÉGOU
Quel élevage pour demain ? Quel vétérinaire pour cet élevage ? Les vétérinaires face aux défis de l’élevage |
Assumer la transition écologique, c'est développer des activités humaines durables. Dans ce domaine l’élevage, principale source d’alimentation en protéines des société occidentales, est confronté à des attentes qui doivent être analysées et prises en compte. Dans la frénésie de la course aux rendements durant trente glorieuses, les vétérinaires sont toujours restés vigilants au bien-être animal. Depuis les années 2012-2017, ils ont entendu les appels à l’agro-écologie et ont intégré les différentes contraintes climatiques, environnementales et de bien-être animal dans leur suivi des élevages. En présence de professionnels de l’élevage, durant cette journée consacrée aux défis actuels de l’élevage, des agronomes, des vétérinaires de différentes filières et des enseignants des écoles vétérinaires nous présenteront les réponses qu’ils entendent apporter.
8h30 Accueil
9h Introduction: Jean-Pierre JÉGOU (Psdt AVF), Bernard CHARPENTIER (Psdt ANM)
9h30-11h DE LA DOMESTICATION À L’ÉLEVAGE MODERNE
Modérateur : Jean-Pierre JÉGOU
Les évolutions des représentations des animaux dans la société française, Bertrand HERVIEU, Docteur en Sociologie, ancien président de l’INRA et de l’Académie d’Agriculture de France, Paris,
Aspects génétiques de l’évolution de l’élevage, Etienne VERRIER, Professeur de Génétique AgroParisTech, INRAE, UMR GABI, Académie d’Agriculture de France, Jouy-en-Josas,
Perceptions sociétales de l’élevage, Daniel SAUVANT, Professeur de zootechnie Agro-ParisTech et directeur de l'UMR-INRA Physiologie de la nutrition et de l'alimentation à l'INA Paris-Grignon, Académie d’Agriculture de France et Académie Vétérinaire de France.
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11h-12h ÉLEVAGE EXTENSIF
Modérateur : François VALON(Psdt Section sciences cliniques AVF)
Grands traits de l’élevage agro-pastoral aujourd’hui en France, Marie-Odile NOZIÈRES-PETIT, Zootechnicienne des systèmes d’élevage, Chercheuse INRAE -UMR Montpellier
La transhumance, Enjeux et avenir d’une pratique millénaire : Christian DUMON, Docteur Vétérinaire,Ancien Président Académie Vétérinaire de France
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12h-13h BUFFET
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13H-16h15 ÉVOLUTION DE L’ÉLEVAGE MODERNE
13h-15h15 ADAPTATION DES FILIÈRES ET RÔLE DU VÉTÉRINAIRE
Modératrice : Jeanne BRUGÈRE-PICOUX(Pr Honoraire ENVA, Mb AVF et ANM)
Filière avicole : Jocelyn MARGUERIE, Vétérinaire Conseil en filière aviaire, Filiavet, Réseau Cristal, Bressuire – Président de la Commission Aviaire de la Société Nationale des Groupements Techniques Vétérrinaires (SNGTV),
Filière cunicole : Bertrand RIDREMONT, Docteur Vétérinaire, Consultant en santé et nutrition animales, Angers - Académie Vétérinaire de France, Vice-Président Association Française de Médecine Vétérinaire Porcine (AFMVP), Membre Association Scientifique Française de Cuniculture (ASFC).
Modérateur : Christophe BRARD(Section Sciences Cliniques AVF, Pdt SNGTV)
Filière vache laitière : Jean-Marc Héliez, Docteur Vétérinaire, consultant en production laitière, nutritioniste indépendant, Responsable filière Ruminants, Groupe Chêne Vert, Lécousse ,
Filière porcine : Mélanie LIBER, Docteur Vétérinaire conseil en production porcine, SELAS Breizhpig, Plérin – Présidente de l’Association des Vétérinaires exerçant en Productions Organisées (AVPO), Membre de la Commission Porcine de la SNGTV.
15h15-16h15 ADAPTATION DE L’ENSEIGNEMENT VÉTÉRINAIRE
Modérateur : Pierre SAÏ (Section Recherche-Enseignement AVF )
Filière vache laitière : Christine FOURICHON, Docteur Vétérinaire, Professeur en Production animale, épidémiologie et économie de la santé, Directrice UMR 1300 Biologie, Épidémiologie et Analyse de Risque en Santé Animale (BIOEPAR), ONIRIS INRAE, Nantes.
Filière porcine : Maxime DELSART, Docteur Vétérinaire, Maitre de conférences associé, Département Productions animales et santé publique, ENVA, Maisons-Alfort.
16h15 -17h30 Quel élevage ? Quel vétérinaire ? CONCLUSIONS
Modérateur : Jean Pierre JÉGOU
Invités : représentants MAA,DGAL, DGER, CGAAER, Académie d’Agriculture de France, CNOV, FNSEA, ANSES
RÉSUMÉS DES PRÉSENTATIONS DU MATIN
9h30-11h DE LA DOMESTICATION À L’ÉLEVAGE MODERNE
Modérateur : Jean-Pierre JÉGOU
Les évolutions des représentations des animaux dans la société française,Bertrand HERVIEU, Docteur en Sociologie, ancien président de l’INRA et de l’Académie d’Agriculture de France, Paris.
Quatre périodes des Temps Modernes seront retenues :
- Les animaux aux temps des famines et des disettes;
- les animaux aux temps des concours et de" l'agriculture perfectionnée";
- les animaux aux temps des industries agro-alimentaires;
- les animaux au temps de l'abondance alimentaire.
Aspects génétiques de l’évolution de l’élevage, Etienne VERRIER, Professeur de Génétique AgroParisTech, INRAE, UMR GABI, Académie d’Agriculture de France, Jouy-en-Josas et Alain DUCOS, Professeur de génétique animale à l’École Nationale Vétérinaire de Toulouse, au sein de l’Unité pédagogique Élevage et Santé.
Aspects génétiques de l’évolution de l’élevage : une histoire de temps, de moyens et d’organisation sociale.
Dès les débuts de la domestication, il y a plusieurs milliers d’années jusqu’à 15 000 ans selon l’espèce, les humains ont placé les animaux dans des environnements différents de leur milieu naturel et ont exercé diverses formes de sélection essentiellement fondées sur l’observation. La mise en œuvre d’une sélection méthodique, la constitution de races standardisées et l’organisation des éleveurs requise pour cela datent des XVIIIe et XIXe siècles, en Europe, dans le contexte de la révolution industrielle. L’application à l’échelle de programmes de sélection des outils et méthodes de la génétique remontent au milieu (génétique quantitative et des populations) ou à la fin (génétique moléculaire) du XXe siècle, dans un contexte de très forte spécialisation de l’agriculture, des territoires et des populations d’animaux d’élevage. La sélection a entraîné des évolutions spectaculaires de la morphologie, du comportement et de la physiologie des animaux domestiques, dans des pas de temps de plus en plus courts : plusieurs millénaires sous l’effet de la sélection empirique post-domesticatoire ; plusieurs décennies, voire une seule chez les espèces à cycle court, à l’ère de la génétique quantitative. La sélection génomique, déployée dans quasiment toutes les espèces et filières depuis la fin des années 2000, accroît encore l’efficacité des programmes et en modifie sensiblement l’organisation. L’intensification des opérations de sélection depuis le milieu du XXe siècle a contribué à répondre aux attentes des filières et de la société mais au prix de certaines évolutions non désirées, tout particulièrement une dégradation des aptitudes fonctionnelles (reproduction, santé, …) chez les types les plus spécialisés. Aujourd’hui, dans un contexte de dérèglement climatique et de perte de biodiversité, les questions et les enjeux auxquels doit faire face le secteur de la sélection animale sont de plusieurs ordres : (i) quels doivent être les objectifs de sélection, pour quels systèmes d’élevage et dans quels territoires, et jusqu’où nous autorisons-nous à modifier le vivant (éthique de la fin) ; (ii) quels outils et méthodes nous autorisons-nous à employer pour atteindre ces objectifs (éthique des moyens) ; (iii) comment préserver et valoriser la biodiversité domestique ; (iv) quelles places respectives pour les différents opérateurs et, notamment, quels rôles doivent ou peuvent jouer les éleveurs ? En définitive, quels systèmes agricoles et alimentaires veut-on promouvoir ? La réponse à ces différentes questions relève bien moins de choix techniques que de choix de société.
Perceptions sociétales de l’élevage, Daniel SAUVANT, Professeur de zootechnie Agro-ParisTech et directeur de l'UMR-INRA Physiologie de la nutrition et de l'alimentation à l'INA Paris-Grignon, Académie d’Agriculture de France et Académie Vétérinaire de France.
La perception se défini assez simplement, par contre les perceptions sociétales relatives à un domaine particulier constituent un système complexe. C'est le cas de l'élevage pour lequel la perception se construit à 3 niveaux au moins: (1) les individus, (2) les groupes plus ou moins organisés de personnes ayant une perception homogène de l'élevage. Ces nombreux groupes interagissent les uns avec les autres et créent ainsi la complexité du système, (3) la société dont l'opinion et les décisions dépendent parfois plus des actions des groupes influents que d'un processus démocratique.
1. Le contexte général de l'élevage dans nos sociétés
Par rapport à l'élevage il importe de faire six constats historiques plus ou moins récents qui ont contribué à forger son image actuelle :
1.1. Il y a eu une distanciation progressive entre les éleveurs et les citoyens. Ainsi, il y a 8 à 10000 ans, on peut penser que toutes les familles sédentarisées pratiquaient a priori l'élevage alors qu'actuellement, dans notre pays, il y a un éleveur pour 100 familles, ou pour 250 habitants, qui pour la très grande majorité d'entre elles ne connaissent pas l'élevage et ne peuvent donc pas en avoir une perception objective par un vécu.
1.2. Au cours du XXe siècle les élevages ont été confrontés à six défis majeurs successifs qui se sont ajoutés les uns aux autres et imbriqués à travers un cahier des charges de plus en plus compliqué. Il s'est agit de (1) produire plus pour atteindre une autonomie alimentaire, cette phase qui a débuté vers la fin du XIXe siècle s'est prolongée jusque vers 1980, la fin des "30 glorieuses", (2) gagner en efficience dans la transformation 'ressources ==> produit animal', ce gain étant d'abord obtenu par l'emploi d'animaux plus performants, (3) faire évoluer la composition et la qualité des produits commercialisés pour les adapter à la demande sociétale (moins de lipides et plus de protéines, meilleure composition en acides gras...), (4) diminuer les rejets organiques (N, P, CH4...) dans l'environnement, cette préoccupation a émergé au début des années 70, (5) respecter le bien être des
animaux d'élevage, cette préoccupation a pris forme à la fin du XXe siècle dans des milieux urbanisés, (6) satisfaire des représentants consommateurs qui sont de plus en plus attentifs aux points 3 à 5 précédents et qui, par leurs politiques d'achat, prennent de plus en plus de pouvoir vis à vis de certains choix techniques des éleveurs (cf élevage de plein air...).
1.3. Au moins 10 crises sanitaires successives, impliquant plus ou moins les produits animaux et/ou l'élevage, sont survenues depuis le dernier quart de siècle [1996: crise de la vache folle; 1999: crise de la dioxine; 2001-2002: fièvre aphteuse; 2003: grippe aviaire; 2007: fièvre aphteuse; 2008: cas de listériose; 2013: fraude aux lasagnes contaminées; 2016-2017: salmonelles dans les laits infantiles Lactalis; 2018: oeufs contaminés au Fipronil; 2020 crise de la Covid]. Malgré des causes très différentes, ces crises ont été largement relayées dans les médias, le plus souvent sous un angle défavorable à l'élevage dit intensif.
1.4. les progrès de l'évolution technique et technologique des élevages sont très rapides (cf hygiène et contrôle des pathologies, automatisation, informatisation, intelligence artificielle......), ils véhiculent malgré eux l'image d'un élevage toujours plus productiviste qui est fortement critiqué par les nostalgiques de "l'élevage d'autrefois".
1.5. l'évolution climatique récente et future probable amène à réduire fortement les activités productrices de GES. A ce titre, l'élevage représente selon les estimations de l'ordre de 16% des GES anthropiques. En conséquence pour atténuer les critiques à ce sujet, l'élevage doit produire un effort pour se rapprocher de la neutralité carbone, les médias font un large écho sur ce sujet. Remarquons que sur ces aspects certains groupes de perceptions a priori peu compatibles commencent à dialoguer utilement (cf discussions entre INTERBEV et la Fondation Nicolas Hulot...).
1.6. la population de la terre continue à croitre de façon exponentielle et plus rapidement que les surfaces productives. Cette évolution soulève la question de la sécurité alimentaire dans les Pays hors OCDE et celle de la concurrence entre les animaux et les hommes (Feed vs Food, voir Biofuel) et de la nécessité de consommer moins de produits animaux, de viande en particulier. Ces phénomènes génèrent des partisans d'une réduction drastique des activités d'élevage dans le monde, alors que la demande en protéines d'origine animale est sur la tendance de +50% sur la première moitié du XXIe siècle dans les Pays hors OCDE (cf FAO). Enfin de nombreux groupes d'opinion sur l'élevage des pays de l'OCDE ignorent que les activités d'élevage des pays hors OCDE permettent (1) de sauver de la famine près d'un milliard d'hommes, (2) représentent une source de travail (traction) et (3) constituent une source irremplaçable d'engrais pour les cultures.
2. Les rôles des principaux acteurs de la perception sociétale
Les groupes de perception évoqués au § 1. constituent autant de moteurs d'évolution des filières animales et grâce au développement des médias façonnent la perception sociétale de l'élevage. Nous en avons retenu les dix principaux :
2.1. les législateurs au niveau Européen définissent les grandes lignes de la réglementation que les pays appliquent en fonction de leurs situations propres (cf principe de subsidiarité).
2.2 .les règles des marché internationaux se traduisent souvent par des importations "obligées" (hors Europe) de produits qui ne sont pas élaborés dans les mêmes contextes règlementaires (sanitaires et environnementaux) et peuvent contribuer à dégrader l'image des produits animaux auprès des consommateurs.
2.3. les medias (radio, télévision, journaux, internet...) prennent un poids et une responsabilité croissants dans la construction de l'image de l'élevage. En conséquence cela signifie qu'il est important que les règles d'objectivité et d'éthique soient respectées. Il semble que ça ne soit pas toujours le cas (cf émissions "à charge" par le choix des participants à une table ronde; cf points de vue différents entre la presse générale et les revues techniques sur un même sujet...).
2.4. les consommateurs ne sont pas représentés à travers un processus démocratique national, ils ne peuvent donc pas s'exprimer à ce titre. Par contre, il y existe des associations de consommateurs dont les plus sérieuses et structurées éditent des revues ('60 millions de consommateurs', 'Que choisir'...) qui sont logiquement amenées à aborder des questions relatives aux produits animaux voire même à l'élevage.
2.5. des groupes de pression extrémistes et très minoritaires qui existent également dans le domaine de l'élevage ou de leurs filières. Leurs actions sont souvent de illégales et violentes, elles sont cependant relayées par certains médias et surtout dans les réseaux sociaux. Au- delà de cette illégalité, certaines actions ont alerté sur certaines conditions non admissibles d'élevage ou d'abattage des animaux.
2.6. les labels de production permettent de rassurer les consommateurs et de guider leurs choix. Il peut s'agir de labels relatifs à la qualité des produits (cf Label Rouge) ou de la qualité de la façon de produire (Bio, HQE, produits issus du pâturage...) ou d'un terroir associé à des contraintes techniques (AOP, IGP, Lait de Montagne...), ou bien encore de marques qui respectent des cahiers des charges bien déterminés (Loué, Blanc-Bleu-Coeur...). On peut toutefois regretter que ces différents produits sous labels ne représentent qu'en moyenne 5 à 15% des achats, en partie du fait d’une insuffisance de perception de la qualité supplémentaire en face du surcroit de coût induits par les cahiers des charges de ces labels.
2.7. l'étiquetage des produits animaux permet d'informer sur l'existence des labels de production, ils sont amenés à évoluer de façon importante avec la mise en place de l'étiquetage sur (1) l'impact environnemental (impacts GES, eutrophisation des eaux, biodiversité...) et (2) le bien-être des animaux avec 4 niveaux (A, B, C et D qui est le standard).
2.8. la grande distribution joue également un rôle important vis à vis de l'orientation de la consommation des produits animaux et par voie de conséquence de l'élevage. Ce rôle est parfois positif : garantie de traçabilité et de salubrité, promotion des labels et de techniques de production (cf élevage en plein air...), respect de contraintes religieuses qui aide à s'adapter à la demande (Hallal, Casher,…). Cependant il est aussi parfois négatif : promotion des produits "veg..." pour lesquels les marges sont élevées.
2.9. la formation sur les réalités de l'élevage dans les Collèges et Lycées généraux est particulièrement déficiente voire biaisée (cf élevage = pollution), cela a été bien montré lors d'enquêtes récentes. D'une façon plus globale on peut dire que les personnages médiatiques de notre Pays (journalistes, politiques, écrivains...) sont, à quelques exceptions près, largement ignorants de ce qu'est l'élevage, ce qui est très regrettable.
2.10. les salons agricoles placés en zone urbaine (SIA, SPACE, Sommets de l'Elevage...) contribuent à véhiculer des images positives des élevages. Il en est de même pour des manifestations agricoles locales qui sont généralement relayées positivement par les médias locaux (cf Fêtes de la Transhumance...).
Conclusions :
- A l'évidence un fossé s'est creusé par une distanciation toujours plus grande entre l'élevage moderne et le reste de la société largement mal informée des réalités de l'élevage et nostalgique des images des anciens élevages.
- La perception sociétale de l'élevage représente un objet complexe qui est difficile à appréhender en raison du nombre, de la diversité et de l'hétérogénéité des acteurs inter-agissants.
- Un gros travail d'information et de formation est nécessaire de la part de tous les personnes travaillant dans les filières animales. Parmi eux les vétérinaires ont, compte tenu de leurs compétences unanimement reconnues dans la société, un rôle essentiel à y jouer.
11h-12h ÉLEVAGE EXTENSIF
Modérateur : François VALON(Psdt Section sciences cliniques AVF)
Grands traits de l’élevage agro-pastoral aujourd’hui en France, Marie-Odile NOZIÈRES-PETIT, Zootechnicienne des systèmes d’élevage, Chercheuse INRAE -UMR Montpellier.
La transhumance, Enjeux et avenir d’une pratique millénaire : Christian DUMON, Docteur Vétérinaire,Président honoraire de l’Académie Vétérinaire de France.
Définition
Forme particulière de l’agropastoralisme.
Importance des deux formes de transhumances pratiquées dans les six massifs montagneux français.
40.000 exploitations déplacent chaque année entre 3,2 et 3,3 millions d’animaux.
I-Enjeux : Deux perceptions contradictoires
- Une activité archaïque qui dégrade l’environnement
- Une activité à soutenir et revaloriser
II-Avenir
1-Des atouts
- Utilité reconnue par les pouvoirs publics (loi pastorale 1972 et loi montagne 1985)
- Valorisation des territoires d’altitude :
- Maintien des milieux ouverts et de la biodiversité
- Protection contre incendies et avalanches
- Image sociétale positive (BEA, RHA, sauvegarde des races de montagne)
- Participation majeure au développement exponentiel de l’agritourisme
- Savoir-faire remarquable des bergers : soins aux troupeaux dans le respect de l’environnement
2-Des fragilités
- Dépendance des aides nationales et européennes
- Métier de berger insuffisamment considéré et rémunéré
- Prédation insupportable : Des chiffres en constante progression, inefficacité des moyens de protection, découragement des éleveurs et des bergers, abandon des élevages ,....
- Vers une possible coexistence loups/troupeaux, des pistes de solutions ?
Conclusion
- Les atouts auront-ils raison des fragilités
- Nouvel espoir et symbole fort : reconnaissance de la transhumance au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.
RÉSUMÉS DES PRÉSENTATIONS DE L’APRÈS-MIDI
13H-16h15 ÉVOLUTION DE L’ÉLEVAGE MODERNE
13h-15h15 ADAPTATION DES FILIÈRES ET RÔLE DU VÉTÉRINAIRE
Modératrice : Jeanne BRUGÈRE-PICOUX(Pr Honoraire ENVA, Mb AVF et ANM)
Filière avicole : Jocelyn MARGUERIE,Vétérinaire Conseil en filière aviaire, Filiavet, Réseau Cristal, Bressuire – Président de la Commission Aviaire de la Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires (SNGTV).
Être vétérinaire volailles en 2021, c’est exercer la médecine des populations potentiellement d’une douzaine d’espèces différentes. C’est accompagner des éleveurs et des filières fortement intégrées d’un large panel de productions spécialisées, de modes d’élevage et de cahiers des charges privés. Les productions volailles rassemblent de nombreux atouts : avantages santé, accessibilité sociétale, durabilité économique.
Premières viandes consommées dans le Monde, les filières volailles souffrent cependant parfois d’un déficit d’image et doivent s’adapter aux demandes sociétales. Toute décision, à toutes les échelles, répond à 3 forces de contraintes (environnement, santé publique, bien-être animal) et à 1 objectif de performances économiques.
Quelques 150 à 200 consœurs et confrères exercent en volailles à titre principal ou exclusif en secteur libéral, souvent dans des réseaux de cabinets, ou dans des entreprises privées. Les échanges et la représentation de leurs intérêts au niveau national se fait au niveau national au travers de la SNGTV, des OVVT et d’autres organismes à vocation sanitaire ou scientifique à l’échelle nationale ou européenne. Ils sont pleinement acteurs des filières auprès des éleveurs, de leur encadrement technique, de l’alimentation animale, de l’amont et de l’aval.
S’offrent aux vétos volailles des « challenges » majeurs pour leur avenir, sur tous les aspects de leurs métiers très divers. Comment assurer la santé des animaux avec le « zéro antibiotique », la massification des vaccins au couvoir et le marché libre des produits alternatifs ? Comment rester garant de la sécurité sanitaire des produits quand l’autonomie alimentaire est remise en cause par l’extensification des systèmes d’élevage et que le maillage vétérinaire n’est plus financé ? Comment développer l’expertise conseil et l’offre de formation vétérinaires sur des sujets cruciaux comme la biosécurité et le bien-être animal en trouvant la juste place dans les politiques globales des entreprises de la filière ?
Filière cunicole : Bertrand RIDREMONT, Docteur Vétérinaire, Consultant en santé et nutrition animales, Angers - Académie Vétérinaire de France, Vice-Président Association Française de Médecine Vétérinaire Porcine (AFMVP), Membre Association Scientifique Française de Cuniculture (ASFC).
La production de lapins de chair est intégrée à une filière de petite taille en France (même si notre pays se positionne au 4ème rang mondial), mais constitue une activité concentrée, dynamique et innovante. Face à une diminution régulière de la viande de lapin, dont pourtant les qualités nutritionnelles et sanitaires sont reconnues, la production connait aussi une décroissance régulière, avec des arrêts d’élevage supérieurs aux créations. Le modèle dominant d’élevage est de type naisseur-engraisseur, en bâtiment clos et cages grillagées, mené en conduite en bandes, avec utilisation de l’insémination artificielle. Cette filière doit faire face à des défis sanitaires et réglementaires : lutte contre les maladies infectieuses, sachant l’impact économique majeur lié notamment à l’infection par le calicivirus de la maladie hémorragique (variant RHDV2) ; diminution de l’antibiorésistance par des mesures de restriction des prescriptions d’antibiotiques. Elle doit aussi répondre à des enjeux sociétaux : le bien-être animal (transition vers des systèmes d’élevage alternatifs aux cages), la problématique environnementale, le développement de la génomique, les technologies du numérique et la médecine de précision.
Face à des éleveurs de plus en plus spécialisés et performants, le vétérinaire a tous les atouts pour se positionner comme interlocuteur technique et sanitaire majeur, dans un rôle de conseil axé sur les mesures de prévention des maladies infectieuses et de médication raisonnée, le respect du bien-être animal et plus largement l’accompagnement technico-économique de l’éleveur. Ainsi, la réussite des actions menées depuis 2011 pour diminuer l’antibiorésistance en élevage, l’augmentation de la pression vaccinale et le renforcement des mesures de biosécurité pour combattre les principales pathologies infectieuses du lapin, le développement de méthodes d’évaluation du bien-être en élevage sont autant de domaines où le vétérinaire joue un rôle central dans la filière. Le vétérinaire spécialisé en cuniculture peut bénéficier d’un accompagnement technique permanent en termes de formation et d’information auprès des organisations techniques vétérinaires (Commission cunicole SNGTV, AVCF) et autres instituts ou associations spécialisés dans cette filière (ITAVI, ASFC). Une recherche dynamique s’est constituée autour de pôles de compétences (ENV, INRAE, ANSES, …), permettant d’accompagner les évolutions et transitions nécessaires de la filière en termes de génétique, alimentation, bien-être et santé des lapins d’élevage. Enfin le vétérinaire, dans un modèle économique permettant de fidéliser l’éleveur, doit s’orienter vers une rémunération par le conseil, à travers des protocoles de suivi sanitaire ou des audits de biosécurité par exemple.
Modérateur : Christophe BRARD(Section Sciences Cliniques AVF, Pdt SNGTV)
Filière vache laitière : Jean Marc HELIEZ, Docteur vétérinaire, Consultant en production laitière, nutritionniste indépendant, Responsable Filière Ruminants, Groupe Chêne Vert, Lécousse.
Cette présentation n’a pas la prétention d’expliquer ce que doit faire la profession vétérinaire pour s’adapter à l’évolution des élevages. Son objet est de présenter un retour d’expérience et une vision dans un contexte locorégional de forte densité à la fois en troupeaux laitiers mais aussi en intervenants en élevage. Notre cabinet est situé au croisement des départements de l’Ille et vilaine, de la Mayenne et de la Manche.
L’élevage laitier vit depuis des années une triple mutation. Une mutation géographique avec une production qui se concentre dans le quart nord-ouest de la France. Une mutation structurelle avec d’abord une baisse du nombre et un agrandissement des élevages, mais aussi une plus grande diversité des modèles de production, un recours croissant au salariat, une tendance encore modeste mais inéluctable à la rationalisation des pratiques. Enfin une mutation technique avec notamment l’augmentation de l’automatisation et de la numérisation des élevages, mais aussi avec l’accélération du progrès génétique et la progression du niveau de production moyen.
En parallèle de ces changements les besoins des éleveurs en matière de conseil-service (nutrition, santé, reproduction mais aussi management-gestion, bien-être animal, …) évoluent avec parfois un décalage au regard des offres classiques.
Dans ce contexte le vétérinaire doit s’adapter s’il veut rester un intervenant prioritaire dans les élevages, et ne pas se retrouver cantonné au seul curatif. Et ce même si sa compétence reste déterminante en la matière. Si le suivi en reproduction est la porte d’entrée la plus classique en matière de conseil-service pour un vétérinaire, il nous est apparu qu’élargir notre champ d’expertise et que développer une capacité forte en nutrition et en suivi global répondait à la demande de beaucoup d’élevages. Les ingrédients pour y parvenir ont été :
- Des ressources humaines dédiées au « service-conseil »,
- Un « dossier médical et zootechnique » fort en s’adaptant à la plus grande variabilité des sources de données,
- Un champ d’expertise élargi : santé et reproduction certes mais aussi nutrition, confort et logement, robotisation, productivité et gestion, économie de l’élevage, …,
- Une offre de service « matérialisée »,
- Une méthode de base standardisée.
Pour confirmer à l’avenir cette évolution dans notre façon de travailler de nombreux défis restent à relever :
- Attractivité et rétention des talents,
- Gestion de l’équipe vétérinaire et des compétences dans des domaines d’intervention qui demandent beaucoup de recul,
- Amélioration permanente de l’offre pour à la fois mieux répondre aux attentes des clients et aux attentes sociétales,
- Digitalisation de l’activité,
- Communication et marketing des services dans un contexte de forte augmentation de la concurrence en conseil,
- Articulation « service-produit ».
Filière porcine : Mélanie LIBER, Docteur Vétérinaire conseil en production porcine, SELAS Breizhpig, Plérin – Présidente de l’Association des Vétérinaires exerçant en Productions Organisées (AVPO), Membre de la Commission Porcine de la SNGTV.
La France est le 3ème pays producteur de porcs dans l’Union Européenne. Elle compte près de 10.000 élevages produisant plus de 300 porcs, soit 99 % de la production. On observe une forte régionalisation de cette production avec 80 % dans le Grand Ouest (dont 58 % en Bretagne). 90 % de la production porcine est mise en marché par des groupements de producteurs. L’exploitation porcine moyenne en France n’est pas « hors sol » : elle comprend 83 ha de Surface Agricole Utile pour 174 truies et 770 places de porcs charcutiers (moyennes pour tous les types et tailles d’élevage). Le modèle d’élevage prédominant est le type « naisseur-engraisseur ». La consommation moyenne de viande de porc en France est de 32 kg par habitant et par an.
La filière porcine doit relever un certain nombre d’enjeux et répondre à des défis sociétaux croissants :
- Baisse du recours aux antibiotiques et lutte contre l’antibiorésistance : l’exposition des porcs aux antibiotiques a baissé de 60 % entre 2011 et 2019.
- Le renforcement de la biosécurité : Une exigence pour éviter l’introduction et la diffusion d’agents pathogènes dans les élevages (exemple de la Peste Porcine Africaine).
- La montée en gamme : par exemple, la production de viandes sous SIQO pour répondre à une demande sociétale croissante, tout en maintenant la rentabilité de l’élevage.
- Le bien-être animal : c’est une attente majeure de la société civile et la filière fait face à ces enjeux, par exemple concernant la mise en place de cases liberté pour les truies allaitantes également, l’arrêt de la castration à vif des porcelets mâles ou du recours à la caudectomie.
- Le développement de la médecine de précision avec des outils connectés (« smart farming »).
- L’environnement : la réduction des émissions d’azote (traitement des lisiers) et de la consommation d’énergie.
- L’attrait du métier d’éleveur : réduction des tâches pénibles, bien-être au travail, communication positive.
On compte environ 100 à 120 vétérinaires ayant une activité significative, partielle ou totale, en production porcine. La première mission du vétérinaire spécialisé est le suivi sanitaire des élevages : comme vétérinaire sanitaire (suivi des maladies réglementées, visites sanitaires porcines) puis comme vétérinaire « traitant » dans le cadre d’un contrat de soins, avec une activité de conseil axé sur la dynamique des populations, l’utilisation du diagnostic sous toutes ses formes et une approche préventive dominante. Il a également un rôle de formation auprès des éleveurs et autres intervenants de la filière. Il est aussi souvent prestataire auprès de différents maillons de la filière : groupements de producteurs, organismes de sélection génétique, fabricants d’aliment. Le vétérinaire en suivi d’élevages de porcs doit faire preuve des compétences ou qualités suivantes : rigueur, esprit de synthèse, capacité d’adaptation, travail en équipe, communication (relationnel) et pédagogie.
Enfin il doit suivre une formation continue, à travers notamment une interaction avec les organisations techniques spécialisées comme la SNGTV, l’AFMVP et l’AVPO. Face aux enjeux sociétaux actuels, le vétérinaire devra être capable d’accompagner l’éleveur vers des évolutions ou transitions en termes de bien-être animal, biosécurité, prévention, utilisation des données d’élevage et des outils numériques pour contribuer aussi au bien-être de l’éleveur et à l’économie de l’élevage : un métier passionnant !
15h15-16h15ADAPTATION DE L’ENSEIGNEMENT VÉTÉRINAIRE
Modérateur : Michel THIBIER(Section Recherche-Enseignement AVF)
Filière vache laitière : Christine FOURICHON, Docteur Vétérinaire, Professeur en Production animale, épidémiologie et économie de la santé, Directrice UMR 1300 Biologie, Épidémiologie et Analyse de Risque en Santé Animale (BIOEPAR), ONIRIS INRAE, Nantes.
Filière porcine : Maxime DELSART, Docteur Vétérinaire, Maitre de conférences associé, Département Productions animales et santé publique, ENVA, Maisons-Alfort, et Catherine BELLOC, Docteur Vétérinaire, Professeur de Médecine des Monogastriques d'élevage, ONIRIS, Nantes, Diplomate European College of Porcine Health Management (ECPHM).
Cette présentation sur l’enseignement vétérinaire face à l’évolution de la société et du métier de vétérinaire dans la filière porcine a été préparée conjointement par les enseignants en production et médecine porcine de l’ENVA, l’ENVT et Oniris.
L’enseignement dans cette filière a beaucoup évolué depuis 30 ans, même si les traditionnels outils, qui ont fait leurs preuves, comme les visites d’élevages, les visites d’abattoirs, les stages ou encore l’étude de cas cliniques sont encore très présents et intègrent les nouvelles connaissances sur la pathologie et sur les approches diagnostiques. Mais avec l’évolution de la société et des attentes sociétales, des domaines de compétence ont pris plus d’importance dans l’enseignement, comme le bien-être animal ou la biosécurité par exemple. L’évolution des étudiants eux-mêmes et de leur nombre nous ont poussé à faire évoluer nos méthodes d’enseignement en intégrant plus d’interactivité et de gamification, grâce notamment à des nouvelles technologies qui nous permettent de proposer des visites d’élevages en réalité virtuelle, ou en proposant des salles de simulation avec mannequins. La forte sensibilité de nos étudiants à l’animal et son bien-être nous conduit à concevoir en parallèle de nouvelles séquences d’interaction avec les animaux, les vétérinaires et les éleveurs en situation réelle. Enfin, d’une façon générale, l’internationalisation de la profession est prise en compte dans l’enseignement vétérinaire, avec des mobilités internationales obligatoires, des cours de perfectionnement en anglais et les résidanats préparant aux différents Collèges européens, dont celui de gestion de la santé des porcs.