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Communiqué de l'AVF du 11 octobre 2023: Botulisme alimentaire

Dans un communiqué en date du 11 octobre 2023, l'Académie Vétérinaire de France rappelle la gravité du botulisme et la nécessité du respect des règles d'hygiène en agro-alimentaire avec une attention particulière pour tous les aliments conservés

 

 

Communiqué de l’Académie Vétérinaire de France 2023-1

                

BOTULISME ALIMENTAIRE

 

Paris, le 11 octobre 2023

Début septembre 2023, plusieurs personnes ont été intoxiquées après avoir consommé des sardines en conserve artisanale dans un bar bordelais. Au 14 septembre 2023, cette intoxication a provoqué le décès d’une personne et l’hospitalisation de 10 autres[1]

 

 Le botulisme est une affection neurologique de l'homme et des animaux qui peut se manifester sous plusieurs formes : botulisme alimentaire, botulisme par colonisation intestinale, botulisme par blessure. Le botulisme alimentaire est la forme la plus fréquente, c'est l'intoxication alimentaire la plus sévère, car souvent mortelle sans prise en charge rapide après l'apparition des symptômes, mais elle reste une maladie rare (20-30 cas par an en France). Le botulisme alimentaire est dû à l'ingestion de toxine botulique préformée dans un aliment. On distingue 8 types de toxines botuliques (A-H) qui sont produites par des bactéries anaérobies, sporulées dénommées Clostridium botulinum et par quelques souches atypiques d'autres Clostridium. Le type A est la toxine qui induit les formes les plus graves chez l'homme. La dose mortelle par voie orale est de 80 à 100 mg pour un adulte avec des signes cliniques apparaissant à des doses beaucoup plus faibles de l'ordre de 30 ng. C'est la plus active de toutes les toxines.

            Les aliments responsables de botulisme sont toujours des aliments non acides ayant subi une étape de conservation dans des conditions favorables au développement des spores contaminantes et à la multiplication bactérienne et de ce fait à la production de toxine botulique. Les conserves industrielles traitées par la chaleur sont exceptionnellement responsables de botulisme du fait des barèmes de stérilisation utilisés par les industriels, qui ont été validés pour détruire les spores de C. botulinum. Ces barèmes ne sont plus imposés aux industriels par la réglementation ou les services d’inspection. Ils relèvent du choix des responsables des industries agro-alimentaires et font partie du plan de maitrise sanitaire validé par les services d’inspection. En revanche, les conserves familiales ou artisanales avec un traitement thermique insuffisant sont à risque. C’est le cas en particulier des produits traités par la chaleur de façon minimale puis conservés réfrigérés et notamment sous-vide. En France, un aliment fréquemment responsable de botulisme est le jambon familial ou artisanal, salé et séché, le plus souvent en raison d'une salaison insuffisante à cœur du jambon. Il faut noter que les cultures de C. botulinum sont gazogènes et d'une odeur repoussante. Donc, la présence de gaz à l'ouverture d'une conserve ou d'une odeur douteuse doit faire suspecter une possible contamination botulique. Mais, étant donné que la toxine botulique est très puissante, une faible croissance de C. botulinum sans entrainer de modification organoleptique de l'aliment peut être à l'origine d'une production suffisante de toxine pour causer un botulisme.

Les spores de C. botulinum sont ubiquitaires dans l'environnement. Ainsi, les végétaux souillés par de la terre peuvent véhiculer des spores de C. botulinum. Les animaux, porcs en particulier, ainsi que les poissons, peuvent être porteurs sains de spores dans leur tube digestif, généralement en faible nombre, et ainsi être à l'origine de contamination alimentaire. Parfois ce n'est pas l'aliment principal mais des condiments, comme des épices, des plantes séchées, qui véhiculent des spores de C. botulinum.

              Les signes cliniques apparaissent quelques heures jusqu'à 7 jours, le plus souvent dans les premières 48 heures, après le repas contaminant selon la dose de toxine ingérée. Ils sont caractérisés par des paralysies musculaires descendantes (trouble de l'accommodation/vision floue, difficulté de déglutition et d'élocution, faiblesse puis paralysie des membres, paralysie des muscles respiratoires, la mort intervenant par insuffisance respiratoire), et également par une sécheresse de la bouche et une constipation. Dans la phase initiale, des signes digestifs comme nausées, vomissements, diarrhée, peuvent être observés. Ils ne sont pas dus à la toxine botulique mais à d'autres contaminants de l'aliment en cause.

            Le traitement consiste dans l'assistance respiratoire dans les formes graves. Ce traitement lourd en réanimation, nécessitant parfois une trachéotomie et une ventilation mécanique, peut durer plusieurs semaines à plusieurs mois. La sérothérapie est le seul traitement spécifique. Cependant, elle n'est efficace que si elle est instaurée très tôt après le début des symptômes, idéalement dans les premières 24h, ce qui suppose un diagnostic très précoce de cette maladie.

         La survenue du foyer bordelais de botulisme rappelle la gravité du botulisme et la nécessité du respect des règles d'hygiène en agro-alimentaire avec une attention particulière pour tous les aliments conservés. Elle démontre aussi tout l’intérêt d’une bonne coopération entre le secteur de la santé humaine et celui de la santé publique vétérinaire, qui est en charge du contrôle de la sécurité sanitaire des aliments, afin dtrouver au plus vite la source de la contamination. C’est le sens de la démarche “Une seule santé” qui a pour objet de rapprocher les acteurs de la santé humaine, de la santé animale, de la sécurité sanitaire des aliments et de la santé de l’environnement.

 

 

Voir : Rasetti-Escargueil, C., E. Lemichez, and M.R. Popoff, Human Botulism in France, 1875-2016. Toxins (Basel). 2020. 12(5): p. E338. doi : 10.3390/toxins12050338.

 

Mazuet, C., N. Jourdan-Da Silva, C. Legeay, J. Sautereau, and M.R. Popoff, Le botulisme humain en France, 2013-2016. Bull. Epidémiol. Hebdo., 2018. 3 : p. 46-54.

 

Fiche Clostridium botulinum ANSES 2019 : BIORISK2016SA0074Fi

 

Michel Popoff                                                                                                                                                                                                 

Ex-Directeur de l’unité de recherche : Bactéries Anaérobies et Toxines

Ex-Directeur du Centre National de référence : Bactéries Anaérobies et Botulisme

Institut Pasteur – 75724 Paris Cedex 15

Membre de l’Académie Vétérinaire de France

 

              Le Président                                                                         Le Secrétaire Général

 de l’Académie Vétérinaire de France                                   de l’Académie Vétérinaire de France

          Jean-Roch Gaillet                                                                      Didier Boussarie

 

Télécharger le Communiqué de l'AVF 2023-1 du 11 octobre 2023   ICI

 

 

 


[1]www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/botulisme-alimentaire-retour-crise-sanitaire