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Covid-19 : Origines

Origines du Sars-Cov-2

Le nouveau virus Sars-CoV2 à l'origine de la maladie Covid-19 fait partie de la famille des coronavirus. Les virus de cette famille affectent principalement les animaux. Certains de ces virus infectent l'Homme et entraînent des simples rhumes.

L'origine animale du coronavirus à l'origine du Covid-19 est largement privilégiée. Le virus se serait adapté en passant d'un animal (ou d'animaux à animaux) à l'homme. Deux questions sont posées.

  • Quels sont les animaux à l'origine du virus qui a évolué vers le virus du covid-19.
  • Quelles sont les conditions qui ont permis qu'un virus qui été hébergé par des animaux puissent rentrer en contact avec des humains.

Les experts de l'Académie Vétérinaire de France passent en revue les différentes hypothèses proposées pour expliquer l'émergence du Covid-19 et propose une lecture critique des principales hypothèses actuelles.

Voir également un article de Nature sur "Le mystère de la source du coronavirus"
https://www.nature.com/articles/d41586-020-01541-z

Covid-19 : l'analyse des génomes révèlerait une origine double du virus.
Hassanin A. The conversation. 17 Mars 2020. Dans cet excellent article, A. Hassanin (CNRS, MNHN) décortique les hypothèses d'évolution du coronavirus depuis la chauve souris jusqu'à l'homme.

Les chauves-souris: Réservoirs primaires du Sars-Cov-2

Eric Leroy, membre de l'Académie Vétérinaire de France, rappelle que toutes les espèces animales abritent une quantité impressionnante de virus sans développer de symptômes, d'où le qualificatif de " réservoirs ". C'est notamment le cas des chauves-souris insectivores du genre Rhinolophus chez qui plusieurs coronavirus ont ainsi été détectés. Parmi eux, le SARS-CoV, le MERS-Cov et désormais le SARS-CoV-2.

Le Betacoronavirus Bat-Cov RaTG13 de la chauve-souris (Rhinolophus affinis) identique à 96% au SARS-Cov-2

2 éléments de convergences doivent être considérés quand on compare les coronavirus de différentes espèces animales

  • L'homologie de l'ensemble du Génome: Bat-Cov RaTg13 = 96% d'homologie avec Sars-Cov-2   
  •  L'homologie de la séquence région particulière de la protéine S, le domaine de liaison au récepteur ACE2 (Angiotensin Converting Enzyme 2) qui permet au virus d'entrer dans les cellules humaines : Bat-Cov RaTg13 = 77% d'homologie avec Sars-Cov-2 (Donc Bat-Cov RaTg13 rentre mal dans les cellules humaines) 

Diversité des Coronavirus chez les chauves souris

Lattine et al. Origin and cross-species transmission of bat coronaviruses in China

Une étude portant sur les coronavirus hébergés chez les chéiroptères du sud et sud-ouest de la Chine vient d'être mise en ligne sur le site BiorXiv par l'équipe de Petre Daszak. Les auteurs ont établi 630 séquences génomiques partielles (440 nt dans la région RdRp, la plus conservée du génome), doublant ainsi le nombre de séquences disponibles. Les reconstructions phylogénétiques réalisées sur 701 séquences d'a-coronavirus issues de 41 espèces de chauves-souris, et 528 séquences de ß-coronavirus issues de 31 espèces, apportent plusieurs informations intéressantes. Rappelons que le virus Sars-CoV2 est un ßCov, et qu'un a-CoV fut responsable de foyers épidémiques de Sads (Swine acute diarrhea syndrom) dans les années récentes*. Des chauves-souris appartenant aux genres Rhinolophidae seraient les hôtes ancestraux majeurs des coronavirus présents en Asie. Les espèces étudiées se distribuent en 16 genres, dont la majorité (10/16) sont infectés à la fois par des a-CoV et des ß-CoV. A l'échelle de l'évolution, les événements de saut d'espèce interfamiliaux peuvent impliquer des taxa éloignés, et apparaissent plus fréquents chez les a-CoV, pour lesquels l'éloignement phylogénétique entre hôtes exercerait donc une contrainte moins forte que pour les ß-CoV. A l'échelon du genre, une fréquence similaire s'observe, avec une vingtaine de sauts d'espèce intra-familiaux prédits. En conclusion, cette étude, la plus exhaustive à ce jour, indique que les coronavirus, et particulièrement les a-CoV, ont une propension au changement d'hôte y compris au sein de leurs réservoirs naturels.

* H. Laude (BAVF 2020)

Animaux suspectés d'être les reservoirs secondaires du Sars-Cov-2

Plusieurs animaux sont suspectés d'être des réservoirs secondaires du Sars-Cov-2. Aujourd'hui aucune hypothèse n'est validée. 

Hypothèses sur les origines de la transmission du Sars-Cov-2 de la chauve souris à l'Homme

Dans cet article A. Hassanin, décortique les passages possibles de Sars-Cov-2 de la chauve-souris à l'homme. Plusieurs options sont envisagées: de la chasse des chauves-souris à la chasse d'autres espèces animales, contaminées lors de leur stockage avec des chauves-souris dans des entrepôts avant d'être exportées vers des lieux de vente pour être consommées.

A la recherche des réservoirs secondaires du Covid-19 pemettant un processus de recombinaison génétique

On pense aujourd'hui que SARS-Cov-2 est issu d'une recombinaison entre deux virus différents, l'un proche de RaTG13 et l'autre issus d'un animal ayant un Coronavirus capable de rentrer dans les cellules humaines. En d'autres termes, il s'agit d'une chimère entre deux virus préexistants.

Ce mécanisme de recombinaison avait déjà été décrit chez les coronavirus, notamment pour expliquer l'origine du SARS-Cov.

Pour qu'une recombinaison se produise, il faut que les deux virus divergents aient infecté le même organisme de façon concomitante.

Deux questions restent en suspens :

  • Dans quel organisme a eu lieu cette recombinaison ? (une chauve-souris ou une autre espèce ?)
  • Dans quelles conditions a eu lieu cette recombinaison ?

Quels sont les animaux qui ont un récepteur cellulaire (ACE2) susceptible d’interagir avec le Sars-CoV-2 ?

La première étape du cycle viral est la reconnaissance d'un récepteur cellulaire par une protéine de surface du virion, et cette interaction est un déterminant majeur - pas le seul - du tropisme tissulaire d'un virus mais aussi de son spectre d'hôte. Une publication en preprint émanant de l'Institute of Structural and Molecular Biology, Londres, explore une approche in silico dans le but de d'évaluer la stabilité de la liaison entre la protéine S du virus Sars-CoV-2 et son récepteur majeur, ACE2, cela chez pas moins de 215 espèces de vertébrés. La structure tridimensionnelle du domaine RBD (receptor binding domain) de S est connue ainsi que celle de ACE2 dans l'espèce humaine. A partir de la séquence du gène orthologue, - très conservé (≥ 60% d'identité) - il est possible de modéliser celle de ACE2 dans une autre espèce. Après avoir identifié les résidus de ACE2 virtuellement impliqués dans cette interaction, les auteurs ont calculé le changement en énergie de liaison du complexe dans chaque espèce relativement à l'homme selon 3 protocoles. Ils ont ensuite analysé la corrélation existant entre ces valeurs et les données de sensibilité au virus disponibles in vitro et/ou in vivo. Il en ressort une assez bonne corrélation, avec toutefois quelques exceptions notables en termes soit de sensibilité, soit de résistance (que l'on peut voir dans la table 6 en annexe de l'article). Ainsi le porc, prédit sensible, se montre résistant à l'infection expérimentale, alors que le ousititi et la chauve-souris (Rhinolophus ferrumequinum), prédits résistants, y sont vulnérables. Nonobstant ces anomalies, cette étude a le mérite de montrer que nombre d'espèces de mammifères sont théoriquement sensibles au virus du COVID-19, et peut guider les investigations qui devront être menées afin d'identifier d'éventuelles espèces réservoirs.

 

Dans cette étude est analysée, sur une base structurale, l'affinité de la protéine S du Sars-CoV-2 et les 20 acides aminés (AA) du récepteur ACE2 critiques pour cette interaction, ce pour 93 espèces animales dont 85 mammifères. Les espèces qui maintiennent la majorité des résidus AA clés sont les Primates (score 20/20), les Bovidae et les Cricetidae (score 18/20). Chez les oiseaux et les reptiles, la moitié des résidus AA sont différents.

En conclusion, l’avenir dira, notamment avec la poursuite des essais de transmission expérimentale aux animaux domestiques et d’élevage, laquelle des deux approches - Lam et al. ou Luan et al.- était la plus prédictive. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que l’interaction avec le récepteur cellulaire, même si elle est déterminante, n’est qu’une première étape, et que d’autres facteurs peuvent intervenir en amont (niveau d’expression dans le tissu pulmonaire) ou en aval (étapes ultérieures du cycle viral). A cet égard, il est à noter que le chat et le porc ont des scores proche ou identique dans les deux études précitées, alors que seul le premier se montre sensible à l’infection par le sars-2.

Le pangolin :

Un suspect initial… maintenant disculpé

Le Pangolin a été suspecté comme un hôte intermédiaire dans la transmission du Covid-19 de la chauve souris à l'Homme.

--> Homologie global de la sequence de la proteine S du Pangolin Coronavirus = 99% avec Sars-Cov2 

Cette convergence pourrait être liée à un événement de recombinaison intergénomique survenu il y a des décennies.

  • Mais homologie de l'ensemble du Génome du Pangolin Coronavirus = 90% de Sars-Cov2 (faible) 

Qu'est ce que le Pangolin ?

Le chien viverrin :

Un suspect malgré peu de preuves

Les sites CpG ou CG sont des régions d'ADN où un nucléotide de cytosine est suivi d'un nucléotide de guanine. Ces sites sont reconnus par des protéines "zinc finger antiviral protein" (ZAP) de mammifères pour initier une réponse antivirale. Sur la base d'arguments très indirects, notamment la richesse en CpG comparée des coronavirus respiratoire et entérique canin, l'auteur spécule que le Sars-2 aurait évolué dans un environnement avec un fort taux de ZAP, à savoir l'intestin des canidés, lesquels peuvent consommer des chauves-souris. A cet égard, aucune donnée n'existe quant à la richesse relative des tissus respiratoires et digestifs en protéine ZAP. L'auteur reconnait lui-même le caractère (très) spéculatif de son travail.

Diffusion mondiale du Covid

Comment SARS-Cov-2 se diffuse et continue de se diffuser au niveau mondial ?


Hypothèses sur les comportements humains à l'origine du Covid-19

Les origines de la pandémie de Covid-19 font l'objet de débats passionnés. Plusieurs hypothèses sont souvent évoquées

  • Maîtriser les principes élémentaires de la santé animale pour ménager la santé humaine : une hypothèse sur les origines du Covid-19 

Les populations ex-rurales des bords des mégapoles chinoises ont été poussés, pour sortir de la misère, à avoir de petits élevages familiaux de quelques bovins, porcs et volailles. Plus récemment, une politique nationale incitant à l'élevage d'animaux sauvages a été adoptée pour reconnaître officiellement cette pratique qui s'était largement développée. Selon plusieurs sources, le nombre de paysans chinois élevant des animaux sauvages s'élèverait à 14,1 millions, les espèces principales étant les civettes, les rats bambou, les autruches, les renards et les paons bleus. Ces animaux sont destinés à la consommation (vente à l'état vivant sur les marchés) et à la pharmacopée traditionnelle chinoise. Ces petits élevages sont conduits dans des conditions d'hygiène précaires, avec un mélange d'espèces fréquent. Ceci constitue un énorme creuset propice à la recombinaison de virus et bactéries à la faveur du passage inter-espèces, y compris l'espèce humaine.

Cette hypothèse sur l'origine de zoonoses rappelle la question importante de la biosécurité des élevages et de la santé animale qui si elle n'est pas maîtrisée, peut mener à des nouvelles maladies. 

 

Quelques références

(1) Le défi rural du rêve chinois. Colin S., Hérodote, 2013/3 (n° 150), p. 9-26. https://doi.org/10.3917/her.150.0009

(2) Captive Breeding of Wildlife Resources- China's Revised Supply‐side Approach to Conservation. WANG W., Research Institute of Forestry Policy and Information, Chinese Academy of Forestry, Beijing, 2019. https://wildlife.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/wsb.988

(3) Conférence mondiale sur la réduction des risques biologiques. Construire une coopération pour des systèmes de sécurité et de santé partout dans le monde, OIE, 30 juin-2 juillet 2015. https://www.oie.int/eng/BIOTHREAT2015/recommendations/F_BTR_Conference_Final_report_7_8_2015.pdf

(4) WILDLIFE HEALTH PROGRAMS TO PROTECT LIVESTOCK. Newman S.H., McCracken T. OIE Global Conference on Willife. Animal Health and Biodiversity-Preparing the future. Paris, 2011

(5) Predicting the angiotensin converting enzyme 2 (ACE2) utilizing capability as the receptor of SARS-CoV-2. Qiu Y. et al., Microbes and Infection, 2020. https://doi.org/10.1016/j.micinf.2020.03.003

(6) Growth, Animal Welfare, Environmental and Food Safety Impact: The Case of China's Livestock Production. Li P.J., University of Houston. https://animalstudiesrepository.org/cgi/viewcontent.cgi?article=1034&context=acwp_faafp

(7) Coronavirus closures reveal vast scale of China's secretive wildlife farm industry. The guardian, 2020. https://www.theguardian.com/environment/2020/feb/25/coronavirus-closures-reveal-vast-scale-of-chinas-secretive-wildlife-farm-industry

(8) Legislature adopts decision on banning illegal trade, consumption of wildlife. xinhuanet, 2020. http://www.xinhuanet.com/english/2020-02/24/c_138814139.htm

(9) How China's Poverty Alleviation Campaign Helped Give Birth to COVID-19. Chen C., The Diplomat, 2020. https://thediplomat.com/2020/04/how-chinas-poverty-alleviation-campaign-helped-give-birth-to-covid-19/

  • Idéologies, raisonnements circulaires et origine du Covid 

Une tendance forte est d'expliquer les mécanisme à l'origine du covid en se basant sur une idéologie préexistante à la pandémie. Ce type de raisonnement a pour conséquence de renforcer l'idéologie préexistante, puisqu'elle explique l'origine du covid... Inutile de lister ici ces raisonnements qui ne reposent pas sur des preuves scientifiques et ne permettent pas d'élaborer des politiques de santé publique robustes.

Biodiversité et Covid-19

La crise sanitaire, économique et sociale associée à la pandémie Covid-19 soulève de nombreuses questions sur son origine, sa dynamique et les mécanismes qui l’expliquent. Elle pose aussi la question des éventuelles crises futures, de l’implication des enjeux environnementaux dans ce type de phénomènes et des conditions qui auraient permis, sinon de l’empêcher, du moins de mieux l’anticiper et d’en réduire les conséquences, pour mieux se prémunir lors d’une prochaine crise similaire. Les structures décisionnelles, gouvernement et ministères se trouvant confrontées à la multiplicité des opinions et avis, relatifs notamment aux liens entre Covid-19 et crise de la biodiversité, se sont tournées vers les organismes de recherche en vue d’obtenir leur éclairage sur les points principaux suivants :

Lire le Rapport sur"La Mobilisation de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité par les Pouvoirs Publics Français sur les liens entre Covid-19 et biodiversité".